Mindfulness ou Pleine Conscience, la pratique du présent.
Vidéos
Annuaire
Retour

Mindfulness ou Pleine Conscience, la pratique du présent.



«Mindfulness» ou «Pleine Conscience» est une expression dérivée de l’enseignement du Bouddha. Elle désigne l’attention vigilante à nos pensées, nos émotions et nos actions. Elle est de plus en plus pratiquée en Occident pour ses innombrables vertus, qu’elles soient physiques, psychiques ou spirituelles...





La Pleine Conscience pourrait être définie comme la qualité de conscience qui émerge lorsque nous tournons intentionnellement notre attention vers le moment présent. C’est la conscience portée à l’expérience vécue et éprouvée, sans filtre [nous acceptons ce qui vient, tel que cela vient], sans jugement [nous ne jugeons pas si c’est bien ou mal, désirable ou non], sans attente [nous ne cherchons rien de précis en dehors d’être ici et maintenant].
La Pleine Conscience peut être décomposée en trois attitudes fondamentales :
- une ouverture maximale du champ attentionnel, portant sur l’ensemble de l’expérience personnelle «ici et maintenant», autrement dit, tout ce qui se présente, instant après instant : rythme respiratoire, sensations corporelles, ce qui est vu et entendu, état émotionnel, pensées qui vont et viennent, etc... ;
- un désamorçage des tendances à juger, à contrôler ou à orienter cette expérience de l’instant présent ;
- une attitude mentale «non élaborative», dans laquelle on ne cherche pas à analyser ou à mettre en mots, mais plutôt à contempler et à éprouver.

Les origines
C’est en 1979 que le Dr Jon Kabat-Zinn, professeur émérite en médecine et biologie moléculaire, fonde le célèbre programme «Mindfulness-Based Stress Reduction » [Réduction du stress à partir de la pleine conscience - voir MBSR en fin d’article] à l’Université du Massachusetts pour traiter les malades chroniques. Ces 30 dernières années, le succès du programme et ses résultats remarquables ont suscité un intérêt croissant dans le monde médical.
Une grande partie de ce processus a été inspiré par les enseignements orientaux, en particulier les traditions bouddhistes, où la pratique de l’attention est la 7ème étape du Noble Sentier Octuple pour atteindre la libération ou «éveil spirituel».
C’est certainement le moine bouddhiste vietnamien Thich Nhat Hanh qui a contribué le plus à faire connaître la pratique de la Pleine Conscience au monde occidental. C’est d’ailleurs cet enseignement que le Dr Kabat-Zinn a adapté en un programme structuré de 8 semaines à l’attention de ses patients. Ce programme, sans référence spirituelle ou religieuse, s’est ensuite propagé dans les milieux académiques occidentaux, parallèlement aux enseignements spirituels de Thich Nhat Hanh et d’autres enseignants bouddhistes.

Les principes
Le pratiquant observe ses perceptions sensorielles, ses habitudes mentales positives ou négatives, comment ses pensées apparaissent et disparaissent. L’observateur reste neutre et silencieux en contemplant l’apparition et la disparition des sensations agréables ou désagréables, sans juger, sans chercher à retenir la sensation agréable ou à rejeter la sensation désagréable. Le pratiquant fait ainsi l’apprentissage du détachement et se libère progressivement de ses conditionnements et la prison du mental.
Evidemment, la Pleine Conscience n’est pas limitée à une pratique en assise silencieuse. Elle peut s’étendre aux objets physiques et mentaux qui se présentent dans nos activités quotidiennes. Marcher, préparer un repas, faire la vaisselle ou du rangement peuvent devenir un véritable tremplin pour s’immerger dans l’ici et maintenant. De plus, cette conscience nouvelle modifie immanquablement la qualité de l’action posée. Par exemple, un repas préparé «en conscience» sera chargé de qualités dont un repas «classique», réalisé avec les mêmes ingrédients, ne sera pas imprégné...

Lorsqu’un objet de perception disparaît, la Pleine Conscience ne cesse pas pour autant. L’attention peut par exemple se tourner vers des perceptions internes, telles que celles induites par la respiration ou les sensations corporelles.
Quand un «nouvel objet» apparaît, l’attention se tourne vers lui, mais sans crispation mentale. Le fonctionnement mental «par défaut» est, en effet, la «saisie». Le mental doit «saisir» l’objet de perception afin de le comparer à ce qu’il connaît ou non pour l’étiqueter, le juger et l’archiver. L’idée est donc de lâcher-prise de l’aspect «saisie» du mental pour le laisser entrer dans ce que nous pourrions appeler la «conscience du témoin» qui observe le monde extérieur [ou intérieur] sans comparaison, jugement ou préférence.
Une des clefs consiste à rester immergé dans les sensations corporelles, tout en désinvestissant la tendance du mental «à fuir vers l’avant» afin de se détendre et d’habiter davantage l’arrière de notre tête et de notre corps.
Pour commencer, l’attention portée à notre respiration peut être une précieuse aide à la pratique : inspiration, pause, expiration, pause, etc...



La recherche scientifique
Au cours des 30 dernières années, il y a eu une augmentation du nombre des études publiées sur la Pleine Conscience. On dispose donc aujourd’hui d’un nombre relativement important d’études scientifiquement valides attestant de l’intérêt de la pratique de la Pleine Conscience dans différents troubles médicaux ou psychiatriques, tels que le traitement de la douleur, du stress, de l’anxiété, de la dépression et de la rechute dépressive, des troubles respiratoires et alimentaires, de la toxicomanie, l’amélioration du système immunitaire, etc...
En psychiatrie, on prête une attention toute particulière au programme associant thérapie cognitive et méditation, ou MBCT pour Mindful Based Cognitive Therapy, ou «thérapie cognitive basée sur la pleine conscience». Cette approche de groupe a montré son efficacité dans des situations mettant souvent les thérapeutes en échec, notamment dans le cadre de la prévention des rechutes chez les patients ayant présenté plusieurs épisodes dépressifs.
Quant à la MBSR, pour Mindfulness-Based Stress Reduction, du Dr Jon Kabat-Zinn [cité plus haut], il s’agit d’un programme en 8 semaines qui combine la méditation et le hatha yoga pour aider les patients à faire face au stress, à la douleur et à la maladie. Son objectif est de faciliter une attitude de détachement à l’égard des pensées, des émotions et des sensations corporelles entraînant un stress chez le patients.
Ces programmes ont été validé scientifiquement dans de nombreux domaines.

Un art de vivre
Au-delà de ses divers avantages, qu’elle soit pratique spirituelle ou de santé, la Pleine Conscience est véritablement un art de vivre. Il n’est pas nécessaire d’être bouddhiste, yogi ou considéré comme malade pour la pratiquer. Ainsi, la Pleine Conscience n’entre pas en conflit avec des concepts religieux ou scientifiques et n’essaie pas de propager un système de pensée ou une idéologie. C’est simplement un procédé concret pour développer le potentiel inné de chaque individu. Une invitation à s’immerger dans l’ici et maintenant, seul et unique point d’accès au flux même de la vie. Alors, pourquoi ne pas s’arrêter, fermer les yeux et devenir conscient de ce qui se passe en nous ?
Seulement contempler, sans juger, sans attendre quoi que ce soit, sans rien empêcher ni provoquer, sans s’accrocher ou retenir... C’est tout, c’est simple. C’est la pratique de la Pleine Conscience...

Olivier Desurmont

Références : «Pleine conscience et acceptation : les thérapies de la 3ème vague», I. Kotsou & A. Heeren [De Boeck], «Méditer pour ne plus déprimer : La pleine conscience, une méthode pour vivre mieux», collectif [Odile Jacob], «Le Miracle de la pleine conscience » et «La Vision profonde : de la pleine conscience à la contemplation intérieure», T. Nhat Hanh [Espace Bleu & Albin Michel], «Mindfulness : apprivoiser le stress par la pleine conscience», E. Maex [De Boeck] & article de Ch. André, médecin psychiatre à Paris.



Paru dans l'Agenda Plus N° 240 de Septembre 2012
Retour