De l’alimentation instinctive à la simplicité volontaire
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De l’alimentation instinctive à la simplicité volontaire



TÉMOIGNAGE : un double chemin de vie souvent à contre-courant pour vivre mieux





1. Préambule
J’ai depuis longtemps un attrait particulier pour la recherche dans mon chemin de vie des situations, des évènements, des personnes-clés qui font que, par exemple, j’habite aujourd’hui cette maison, j’exerce ce travail, j’ai ces centres d’intérêt, je fréquente ces personnes, etc... Même s’il est vrai que «tout est dans tout», on peut souvent retrouver quelques moments, quelques décisions qui ont permis, guidé ces évolutions personnelles. Ainsi si je devais revoir un ami perdu de vue depuis une quinzaine d’années et répondre à sa probable question «Et qu’es-tu devenu depuis tout ce temps ?», je ne pourrais pas passer à côté de 2 «rencontres » qui ont profondément changé - on pourrait même dire bouleversé - mon mode de vie, mon mode de penser et aussi un peu ou beaucoup celui de mes proches :

- la découverte de l’alimentation instinctive, il y a maintenant une quinzaine d’années ;
- la découverte de la simplicité volontaire, il y a un peu moins de dix ans.

L’adoption de l’alimentation instinctive [A.I.] n’a pas été qu’une [r]évolution alimentaire personnelle ; elle a enclenché un intérêt de plus en plus vif pour l’écologie, ainsi qu’un processus d’évolution intérieure qui m’a permis ensuite d’accueillir plus facilement d’autres changements profonds, comme ceux proposés par la simplicité volontaire [S.V.]. Mais avant de développer les points communs, les synergies constatées entre l’A.I. et S.V., il est indispensable de bien clarifier les bases de ces deux concepts.

2. L’alimentation instinctive :
une évidence alimentaire socialement difficile à adopter C’est par la rencontre d’Edwige, qui allait devenir ensuite mon épouse, que j’ai découvert l’alimentation instinctive. La lecture du livre de G.-C. Burger «Manger vrai» a été pour moi un vrai coup de poing. Est-ce parce que comme l’auteur, je suis physicien de formation et comme lui sensible aux beaux modèles, aux belles analyses bien confirmées par l’expérience quotidienne que ce livre m’a, moi plus que beaucoup d’autres, complètement «retourné» ? Cette lecture a fait s’effondrer tout le référentiel alimentaire dans lequel j’avais été élevé et que je poursuivais dans ma vie d’adulte sans trop me questionner. La simplicité et la puissance des fondements de l’A.I. peuvent s’apprécier par la lecture des quelques phrases qui suivent :
La génétique de l’Homme d’aujourd’hui est pratiquement identique à celles de nos ancêtres, des cueilleurs-chasseurs vivant dans les régions tropicales. Nos enzymes digestives qui déterminent notre capacité de transformation, d’assimilation, de notre nourriture sont toujours celles de cette époque. Toute cette génétique qui s’est mise en place puis affinée pendant des centaines de milliers d’années est très proche de celle des grands singes comme les bonobos. Notre base alimentaire idéale est donc à rechercher dans celle que ces singes adoptent dans leur milieu naturel. La sélection des «meilleurs» aliments, c’est-à-dire ceux le mieux adaptés aux besoins du moment, est faite grâce aux 2 instincts que la nature à mis en place chez tous les mammifères, nous y compris : l’odorat, d’abord, et ensuite le goût. Ces deux instincts ne fonctionnent [bien] que si l’aliment est dans son état «naturel», on pourrait même dire «originel» ; c’est-à-dire frais, entier ; mais aussi non assaisonné, non mélangé ; et encore non congelé et non cuit ! Le lait de tous les animaux et tous leurs dérivés sont également à exclure de notre palette alimentaire car le lait est un aliment très spécifique, exclusivement adapté et utile aux nouveau-nés et aux très jeunes de la même espèce.

Autant ces fondement de l’A.I. sont simples et clairs, autant leur mise en pratique à court et plus encore à long terme se révèle complexe, ardue dans une société très profondément marquée par la cuisson et par la gastronomie. Il ne faut pas sous-estimer nos résistances intérieures face à ce changement radical de la manière de manger ; mettre son cerveau en mode «pause» pour tout ce qui concerne les repas et faire confiance à l’odorat et au goût est un vrai apprentissage qui peut prendre un certain temps.

Grâce au soutien de ma compagne Edwige et à celui de quelques personnes pratiquant l’A.I., j’ai pu surmonter les difficultés initiales et poursuivre ce mode d’alimentation malgré une profession de cadre à temps plein dans une grande entreprise privée. Quinze ans plus tard, je ne peux que me féliciter de ce choix qui m’a d’abord permis de retrouver, puis de conserver durant toute cette période, une santé remarquable avec une énergie très au-dessus de la moyenne ; je n’ai guère représenter une charge pour la sécurité sociale depuis 15 ans !



Ce passage d’une alimentation classique à une alimentation originelle - on parle même parfois d’alimentation paléolithique en référence à nos ancêtres - m’a amené à m’intéresser à la qualité des aliments et aux méthodes et circuits de production. Et ainsi de découvrir les horreurs et l’absurdité du développement, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, de l’agriculture industrielle basée sur l’usage massif d’intrants chimiques de synthèse et sur une consommation gigantesque d’énergie fossile. C’est en m’informant sur les méthodes de production d’aliments équilibrés, sains que j’ai rencontré d’abord des personnes intéressées par le développement d’un éco-village, puis des membres de l’association «Les Amis de la Terre». C’est grâce à ces nouvelles relations et aux autres qui ont suivi que s’est faite l’ouverture progressive aux différentes dimensions de l’écologie, autant environnementale qu’humaine. Comprendre les conséquences de notre mode de vie occidental [le mien…] sur l’environnement et sur les Hommes d’ailleurs, mais aussi d’ici, de demain, mais aussi d’aujourd’hui, ont constitué un point-clé de ma prise de conscience. Parmi les alternatives envisageables, ici et maintenant, à notre mode de vie destructeur, la décroissance économique soutenable au niveau collectif et la simplicité volontaire au niveau individuel se sont progressivement imposées dans mon analyse et dans celle d’ami[e]s de la Terre de plus en plus nombreux[ses].

3. La simplicité volontaire : une évidence personnelle pour vivre mieux
L’énergie importante [merci à l’A.I.] que j’ai consacrée pendant des années aux questions écologiques et aux actions individuelles et collectives possibles, souhaitables, indispensables est en partie justifiée par ma curiosité «naturelle» que mes parents et mes proches ont eu à subir dès que j’ai appris le mot «pourquoi ?». Une autre raison, probablement encore plus forte, est l’espoir de trouver sur ce chemin vers plus de cohérence personnelle un apaisement à un malêtre diffus apparu «sans raison» avec la petite trentaine. Aujourd’hui, je pense que ce mal-être avait probablement un lien étroit avec une absence complète de questionnement sur le sens de la vie, sur le sens de ma vie. Alors que d’un autre côté, ma curiosité, puis ma formation scientifique, puis mes années de travail dans un centre de recherche & développement m’amenaient en permanence à m’interroger sur les matériaux, sur les technologies, sur la matière. Mon éducation dans une famille catholique ne m’avait pas permis d’entrer dans cette dimension spirituelle car en fin d’adolescence, j’avais fait un «rejet» complet du religieux à la suite de la découverte des erreurs, des horreurs passées commises par cette église des hommes et la pression «castratrice» qu’elle exerçait encore. Ce poids du «vide spirituel» s’est encore renforcé par la prise de conscience des conséquences destructrices de notre mode de vie guidé essentiellement par la sur-consommation de biens matériels jamais satisfaisante. Et aussi par la prise de conscience que le mode de vie occidental, le mien et aussi celui que nous diffusons dans le monde entier via antennes, câbles et satellites, ne pourra jamais être généralisé à la majorité de l’humanité, qu’il ne pourra pas être poursuivi par les générations qui nous suivront, qu’il est incompatible avec les ressources et les capacités de la Terre et que chaque année, les impasses s’accentuent.

La découverte de la simplicité volontaire - c’est-à-dire d’un concept global visant le mieux vivre individuel mais aussi collectif à travers d’une part une modification profonde de notre consommation, et d’autre part un ralentissement de notre vie tout en tissant de nombreux liens de qualité - m’a enfin permis d’enclencher une libération progressive de ce mal-être. La S.V. m’a aussi permis de rencontrer à travers les conférences, ateliers, groupes de S.V., des centaines de «simplicitaires» [nom donné par les membres du réseau québécois de S.V.1 aux personnes choisissant de suivre ce chemin] débutant[e]s ou bien aguerri[e]s qui m’ont construit et permis de m’ouvrir à de nouvelles dimensions intérieures comme celles portées par la communication non violente [merci à Thomas d’Ansembourg] ou plus récemment à celles portées par le bouddhisme engagé proposé et vécu par le moine vietnamien Thich Nhat Hanh, fondateur du village des Pruniers dans le Sud de la France.

4. Alimentation instinctive et simplicité volontaire : un beau tandem qui demande de l’attention
Comme indiqué auparavant, l’alimentation instinctive «m’offre» depuis 15 ans une santé et une énergie comme probablement aucun autre mode d’alimentation n’aurait pu le faire. J’espère pouvoir encore continuer cette expérience pendant de longues années, mais sa pratique reste difficile, demande une vigilance constante, car je me sens souvent comme un ex-fumeur qui devrait vivre en l’alimentapermanence au milieu de montagnes de paquets de cigarettes largement ouverts ! Toutes les gares traversées, toutes les rues commerçantes fréquentées sont des appels permanents par la présence des publicités alimentaires et par les odeurs de nourriture cuites, le plus souvent pesantes et désagréables, à des dérapages alimentaires qui s’ils se concrétisent sont automatiquement sanctionnés par une nuit difficile, par un état de nervosité très désagréable, par de vieilles douleurs qui se réactivent, etc...

Une autre difficulté rencontrée est celle du choix des aliments. Selon les principes de l’A.I., le choix alimentaire devrait être assez large à chaque repas [deux fois par jour pour moi] pour que nos deux instincts puissent y trouver ce qui est adapté à nos besoins du moment. De plus, en raison de notre génétique de cueilleurs-chasseurs des pays chauds, nous avons souvent une attirance forte vers les fruits et légumes des forêts tropicales. Mais mangues, sapotilles, papayes et durians sont difficilement compatibles avec l’exigence de sobriété qui s’impose aujourd’hui à tout écologiste des pays riches. C’est donc une alimentation instinctive écologiquement raisonnée que je me suis construite progressivement avec comme axes principaux :

- une grande priorité au local pendant les mois favorables de production sous notre climat ;
- une faible consommation de protéines animales [viande, poissons, fruits de mer], moins de 20% de celle du «belge moyen».




La pratique de la S.V. permet généralement de réduire de manière significative le niveau de consommation de beaucoup de biens matériels et de services et ainsi de réduire le besoin d’argent et au final, si cela est accepté par l’employeur, de réduire le temps de travail salarié. J’ai pu personnellement mettre cela en oeuvre et après avoir réduit mon temps de travail à 80% pendant quelques années, passer depuis un an à un régime professionnel de mi-temps. Ce temps et cette énergie libérés permettent de soutenir , renforcer ma démarche d’alimentation instinctive écologiquement raisonnée en ayant par exemple plus de temps pour mettre en place un meilleur approvisionnement local grâce à un potager personnel, mais aussi grâce à toutes les productions «libres d’accès » de fruits, petits fruits et oléagineux autour de chez moi. Une autoproduction de protéines animales pourrait aussi être mise en place dans un proche avenir ; de la volaille aux insectes, le choix est vaste !

La forme physique et le calme intérieur que l’A.I. m’apporte depuis des années sont également des éléments importants de soutien dans ma démarche de simplicité. Ainsi le calme intérieur peut s’avérer un élément essentiel si la démarche de simplicité n’est pas acceptée, partagée par les proches pour de bonnes et/ou moins bonnes raisons ! Expliquer, réexpliquer, adapter, parfois se mettre en «pause » sont souvent indispensables pour ne pas briser trop de liens et s’isoler. Ouvrir sa sphère de relations vers des personnes plus réceptives, voire vers des personnes elles-mêmes impliquées dans une démarche de simplicité [comme le permettent les groupes de S.V.2] est aussi une piste habile pour ne pas s’isoler.

Sur base de mon expérience, les résistances de l’entourage sont nettement plus marquées pour le passage à l’alimentation instinctive que pour celui menant vers une vie plus simple. Une des raisons est que le passage à l’A.I. exige un passage à 100% pour en récolter physiquement et psychologiquement pleinement les «fruits», alors que pour la S.V., cela se fait de manière progressive. Une autre raison très importante est que la cuisson est bien plus que la simple transformation, préparation d’aliments ; elle cache toute une dimension complexe de relations d’amour, voire de possession, qui se crée dès les premiers repas préparés que nous avons reçus pour se poursuivre tout au long de notre vie. Refuser le «cuit» est ainsi parfois vécu par l’entourage comme couper, refuser cette relation d’amour.

L’alimentation instinctive est certainement l’alimentation la plus naturelle que l’on puisse imaginer. Comme les aliments sont consommés sans aucun artifice, sans aucune transformation, elle impose automatiquement le choix d’aliments de grande qualité et donc elle favorise les méthodes de production «bio» respectueuses des terres et de la Terre. Menée dans un cadre familial bienveillant, elle est un mode d’alimentation idéal, car le calme intérieur et l’énergie qu’elle procure facilitent toutes les démarches de changement que l’on souhaite entreprendre, comme celles très importantes proposées par la simplicité volontaire. «Vivre plus simplement» est certainement aujourd’hui le plus beau cadeau que nous puissions nous offrir à nousmêmes et à toute la Vie qui nous entoure sur cette merveilleuse Terre.



1 voir le site du réseau québécois de SV : www.simplicitevolontaire.org
2 voir le site des Amis de la Terre - Belgique : www.amisdelaterre.be




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