Le Soufisme
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Le Soufisme



Ou la quête amoureuse du Réel

Mouvement spirituel, mystique et ascétique, le Soufisme est une voie ésotérique et initiatique qui, au 8ème siècle, prend ce nom au sein de l’Islam.
Découverte...



Une première hypothèse quant au sens du mot «soufi» viendrait de l’arabe «safa» ou «safw», qui signifie «pureté cristalline ». Une seconde hypothèse propose la racine «al-souf», «laine», du fait que les ascètes s’en revêtaient. Le soufi portait, en effet, un vêtement de laine en signe de modestie. La modestie et la pauvreté sont évoquées dans d’autres noms donnés à certains d’entre eux : derviche, du persan «derwiš» : «mendiant».

Une quête amoureuse
Pour un soufi tout ce qui existe est Réel. Rien n’est exclu de la Réalité qui est une. Cet être unique, le soufi le considère comme étant Dieu. Lorsque la Réalité est vécue dans toute sa présence, ici et maintenant, le soufi peut réellement faire l’expérience de Dieu.
Comment un être humain peut-il en arriver là ? Par la quête amoureuse.
La plupart des gens vivent une existence empreinte d’absence. Ils ont l’impression qu’il leur manque quelque chose. Cette absence ne provient pas de la réalité même, mais de la perception que les êtres humains en ont développé. Ils ne se sentent ainsi plus en unité avec le Réel. Ils conçoivent leur existence comme un élément distinct de la totalité du Réel. Ils ne sont plus conscients qu’elle est fondée dans l’essence même de la Réalité.
Notre corps physique, nos émotions, nos pensées, notre psychisme font intégralement partie de la Réalité divine. Mais comme la conscience que nous en avons est voilée, nous n’en faisons pas l’expérience dans leur plénitude, nous ne les vivons pas dans la Présence, comme manifestation divine.

Illusion & Réalité
Certaines spiritualités ont donné un caractère illusoire à toute existence perçue par une conscience individualisée. Le but de la pratique spirituelle est alors de libérer la conscience du conditionnement psychique engendré par la diversité de l’existence matérielle, pour se réidentifier à l’essence intemporelle de la conscience : le Soi immuable, seule Réalité.
Le soufisme ne taxe ni le psychique, ni le matériel d’illusoire. La Réalité ne se réduit pas à l’attention portée à la conscience : méditer sur sa nature n’est pas la seule voie d’accès au Réel. Le travail de restauration par la pratique méditative de la conscience dans sa virginité originelle, le Soufi l’accomplit pour se libérer des voiles qui obscurcissent sa vision de la Réalité. Cependant lorsqu’il se fond dans l’état immuable de la conscience, il sent l’émergence, en elle, d’un désir universel. Il sent les forces d’attraction qui en résultent. Toute Réalité a son origine dans ce désir et le manifeste à la fois. Dieu est désir.

Au coeur du Coeur
En portant l’attention à son coeur1, à sa faculté de ressentir la réalité, le soufi découvre qu’il participe en essence à ce désir originel. Dans son coeur repose la mémoire de cette essence d’amour qui donne non seulement naissance à toute réalité mais aussi accueille, comprend et soutient tout ce qui est engendré par la réalité multiple du désir.
«Souvenez-vous de Moi, je me souviendrai de vous!» [cor. 2 :152]2

Le coeur «connaît», lorsqu’il est en état d’intimité avec son objet. Cette intimité atteint l’Union, lorsque le soufi reconnaît Dieu en lui-même, lorsqu’il se réidentifie avec cette essence d’amour universel.
«Qui se connait lui-même connais son Seigneur.» Hadit2

Nettoyer le miroir
Cette connaissance est pour le soufisme le moteur et le but même de la création et de toute entreprise humaine.
Pour y arriver, le soufi doit polir son coeur, en enlever les taches : les agrégats psychiques auxquels il s’est attaché dans son existence marquée par la séparation.
Nettoyer le miroir dans lequel le Réél se reflète, pour y découvrir que le monde, la réalité manifestée, est le lieu où, non seulement son créateur s’exprime, mais aussi s’adresse à lui comme son objet d’amour : son Bien-aimé.
«Le livre du Soufi n’est pas composé d’encre et de lettres, il n’est rien d’autre qu’un coeur blanc comme la neige.»
Rûmi3

C’est la vision du coeur humain purifié qui offre au divin la connaissance du monde. C’est en reconnaissant l’amour de Dieu dans son coeur que l’être humain libère le principe divin de sa solitude.

Voie spirituelle de la Prophétie
Comme le Soufisme est la «voie spirituelle de la Prophétie» et que le Réel parle au coeur de l’Homme, les historiens l’ont assimilé à la voie intérieure de l’Islam. La voie prophétique trouve historiquement son accomplissement dans l’Islam.
Pour Hazrat Inayat Khan, maître soufi indien du 20ème siècle, Mohammed est bien le Prophète ultime de l’humanité, mais comme le soufisme reconnaît la présence divine au coeur de chaque être humain, chacun, quelle que soient les époques et les lieux, peut écouter en lui la voix divine afin de la manifester dans le monde.
C’est là le message du Soufisme à la spiritualité contemporaine. Les maîtres soufis qui, de tous temps, ont accepté comme disciples des membres de diverses religions, sont les témoins de cette universalité du Soufisme. Chacun peut dans son coeur se relier à la Réalité Divine selon sa propre culture.

Habib Pierre Van Huffel

1 «Les soufis croient qu’il y a une substance dans le coeur qui appartient à l’Unicité de l’Être.», Sara Sviri : The taste of Hidden Things. Pge 1
2 cités dans «Le Soufisme et la spiritualité islamique» de Christan Bonnaud
3 cité dans «L’essentiel de la sagesse soufie» de Fabrice Midal.

Références : «Anthologie du soufisme» d’Eva de Vitray-Meyerovitch - Albin Michel, «Le soufisme - Voie mystique de l’Islam» de Thierry Zarcone - Gallimard,» L’essence du Soufisme» de John Baldock - Pocket et «Apprendre à apprendre - Psychologie et spiritualité sur la voie soufie» d’Idries Shah - Courrier du Livre.

Le site www.soufi-inayat-khan.org offre de nombreuses traductions de l’enseignement de ce maître.



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