Une cure “détox” dans nos relations ?
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Une cure “détox” dans nos relations ?



Les relations humaines partagent avec le monde végétal un fonctionnement commun, elles supportent un peu le poison mais pas de trop, faute de quoi, elles se détériorent de façon lente ou rapide, selon la dose administrée et selon la capacité dépurative de l’organisme...





Mais quels sont les poisons, que nous, humains, inoculons régulièrement dans nos relations ? Certes de prime abord, d’aucun penseront aux poisons issus des addictions [tabac, sucre, alcool, médicaments, trop de viande, etc…]. Mais laissons de côté ces poisons physiques déjà forts bien connus autant du corps médical que des associations de prévention ou encore des citoyens informés que nous sommes.
Il en est d’autres de plus sournois, de plus abstraits bien que pourtant leurs effets soient immédiats et souvent même de longue durée. Dans l’immédiat, nos organismes réagissent à ceux-ci non pas par des anticorps mais par des réactions émotionnelles, et dans le plus long terme, les études scientifiques sur la psycho-neuroimmuno- endocrinologie ont montré qu’ils peuvent détraquer un organisme, accélérer le vieillissement de l’organisme, et nous aspirer dans des spirales non vertueuses de santé.
Pour les [re]découvrir, prenez simplement la dernière expérience inconfortable vécue. Que ce soit avec un membre de votre famille, votre partenaire, ou dans une relation amicale ou professionnelle, peu importe. Une fois saisie, branchez-vous à nouveau sur la sensation persistante après cette disharmonie.

D’abord, vous allez découvrir l’émotion de réaction, souvent la colère ou la tristesse, bien que la peur soit parfois aussi de la partie. Une fois mise au jour, cherchez en vous-mêmes «ce qui ne passe pas», «ce qui reste en travers de la gorge», petit ou gros. Il y a fort à parier qu’il persiste un sentiment qui résonne au niveau du coeur. Résonner est le terme approprié, car la résonnance existera naturellement avec nombre d’événements où le même poison a été inoculé et encore actif au coeur.
Si votre bagage verbal est vaste et votre capacité à vous connecter à votre ressenti est rapide, il y a de fortes chances que vous puissiez rapidement mettre des mots sur un ou plusieurs des «poisons ». Si tel n’est pas le cas, rassurezvous, on va accélérer le processus en les explicitant.
Et nos relations sont nombreuses et bien plus vastes puisque nous sommes interconnectés à bien des facettes de cet univers.

Cinq poisons pourrissent nos relations

Primo, l’injustice. Ouvrez le premier média qui vous passe sous la main et ce poison vous saute aux yeux. L’injustice, ce sentiment douloureux qui se manifeste lorsque l’équité n’est plus de mise dans une relation, ou ne semble plus de mise, et la nuance n’est pas mince. L’injustice se manifeste évidemment avec le système judiciaire, mais aussi avec beaucoup de représentants de l’autorité [police, fisc, douane, enseignement, etc…]. Cela se vit énormément aussi dans les enjeux de pouvoir et d’argent qui ne manquent pas en ce début de millénaire. Les excès de discipline aussi induisent l’injustice. Cela se vit partout et tous les jours et l’exhaustivité est impossible. Pour la reconnaître, sachez que la colère, comme une démangeaison à la suite d’une piqûre, en est à priori le principal primorévélateur.



Secundo, l’abandon. L’abandon est ce sentiment que chacun peut vivre lorsqu’il se sent délaissé, que le lien se distend, ou qu’un des protagonistes de la relation accorde de moins en moins d’importance à l’autre, à la relation. Dans les couples, cela est fort commun, et dans les relations internationales, aussi. Tiens, au fait, qu’a fait la Belgique au moment du génocide du Rwanda ? Notre pays a délaissé ce peuple aux exactions et à la barbarie avec les suites que nous savons. Des centaines de milliers de morts en trois mois. L’abandon est tout aussi commun, et lui nous pousse vers les addictions. Quand nous pensons que la Belgique figure parmi les champions du monde de consommation de psychotropes, cela dévoile que dans l’opulence matérielle, nous nous sentons bien délaissé !

Tertio, la trahison. Elle nous installe dans un système de contrôle, puisqu’ayant été abusé de notre confiance et ayant vécu la déloyauté dans une relation, il nous faut désormais nous protéger : contrôler. La trahison prend diverses formes comme la tricherie, la fraude, la malhonnêteté, la non authenticité et évoque en nous souvent des moments phares bien détestables, parfois enfuis, jamais oubliés et quelques fois guéris. Cela court les rues, dans les couples, au boulot ou avec le monde politique. La trahison, c’est un peu comme les métaux lourds dans la nature, il faut du temps pour se détoxifier de ces petits éléments «biopersistants».

Quarto, le rejet. Ecarter une personne ou en nier une de ses facettes. Ne pas la reconnaître, l’ignorer. Bienvenue à tous les plexus solaires noués, souvent le rejet en est pour quelque chose… Franchissez une grille de cour de récréation et cela est aisé à observer, certains enfants sont écartés. Regardez en arrière votre vie amoureuse, lesquels avec vous «jetés» ou lesquels vous ont «rejeté» ? Regardez les rejets d’ethnies, de cultures… et toute la violence que cela engendre ! Premier remède au rejet, le «merci» sincère lorsque vous avez reçu quelque chose. Cela dénoue tout de suite le plexus solaire.

In fine, l’humiliation. Ô sentiment détestable que nous avons tous goûté et qui aura pour partie émergée la honte, la culpabilité. Humilier, c’est juger une personne, soit en voulant la réduire ou en voulant la mettre sur un piédestal, vous sentant alors humilié vous-même. C’est l’inverse du respect. L’humiliation c’est aussi un gros couvercle sur bien des tabous persistants. Pensez à tout ce qui est difficile sur la mort, la sexualité, l’argent, la différence, etc.

Ce tour d’horizon établi, vous aurez sans doute compris pourquoi si peu de relations sont profondément harmonieuses. Car il s’agit, pour chacun d’entre nous de : ni recevoir ni inoculer aucun des cinq poisons dans la relation. Si c’est le cas, votre coeur est comme une rose. Sinon, ce sera plus un marécage. Mais ne vous découragez pas, les bouddhistes nous enseignent que le lotus, une fleur gracieuse au parfum infiniment délicat, émerge des eaux vaseuses…

Raphaël Dugailliez
Psychothérapeute



Paru dans l'Agenda Plus N° 246 de Avril 2013
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