LES DOULAS : pour une périnatalité respectueuse
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LES DOULAS : pour une périnatalité respectueuse



Depuis la nuit des temps, accoucher est un phénomène naturel, un des événements les plus merveilleux et aussi les plus bouleversants. La médecine a fait des progrès phénoménaux mais, paradoxalement, le monde périnatal s’est parfois déshumanisé. C’est dans ce paysage que les doulas font leur (ré) apparition.



Si le mot "doula" semble nouveau à nos oreilles, le rôle de la doula existe depuis toujours. Ses sonorités sont africaines mais ses racines sont ancrées dans le grec ancien et veut dire « servante ». Transposé dans le monde de la périnatalité, « paramana doula » décrit une personne au service de la future maman.
Avant la surmédicalisation de la grossesse et de l’accouchement, dans la plupart des cultures, des femmes de la famille se tenaient aux côtés de la femme enceinte pour lui apporter leur soutien, pour la rassurer et lui transmettre leur expérience. Malheureusement, cette transmission n’est plus ce qu’elle était. Pour Céline Laloux, auteur du livre « Enceinte et curieuse », « on parle beaucoup de la maternité mais on en parle mal, on ne se dit pas les vraies choses et on met surtout en avant les difficultés, la douleur. L’émergence des doulas représente un espoir dans la reconnexion à cette transmission ».



Le rôle de la doula

Une doula est donc une personne qui accompagne, qui est aux côtés des futurs parents lors de la période prénatale, de l’accouchement et du postnatal. Dans un cadre bienveillant, elle propose un accompagnement d’égal à égal, un espace-temps privilégié, baigné dans la bienveillance. Il n’y a pas de programme préétabli. Tout se fait au cas par cas, dans l’échange et l’écoute. Pour Sandrine Tirlo, doula et co-fondatrice de l’AFDB Asbl, Association Francophone des Doulas de Belgique, « il y a 1001 questions et 1001 conseils, parfois on n’y voit plus clair. L’important est que chacune puisse vivre sa grossesse et la naissance qui lui correspond le mieux. C’est comme quand on part en randonnée, on prépare au mieux son sac, peut-être que tout ne se passera pas comme prévu mais au moins on sera bien équipé ! »
Céline Laloux souligne dans son livre que peu de femmes sont conscientes qu’elles ont un véritable rôle actif à jouer dans la façon dont elles envisagent ce moment important de leur vie. Beaucoup de choix leur appartiennent. « Faites ce qui est bon pour vous, faites-vous confiance et pour ce faire, informez-vous » suggère-t-elle. « Chaque personne à ses réponses, ses solutions en elle, mais ne prend ou ne s’autorise pas à prendre le temps de se questionner » explique Sandrine Tirlo, « c’est dans ce contexte que le rôle de la doula est essentiel ».
Lors des rencontres avec la doula, il est possible de venir trouver de l’info, poser des questions, être rassurée ou tout simplement se poser. La culpabilité, le doute, les diktats familiaux emprisonnent et dans ce monde où il nous est demandé d’être des superwomen, des supermen, Sandrine aime rappeler que « faire appel à une doula n’est pas un signe de faiblesse, on fait ce qu’on peut avec qui on est et parfois c’est difficile ».

La (re)naissance des doulas

Si la doula a suscité la méfiance, vue par certains comme une nouvelle lubie bobo, le terme apparaît pourtant dans des études scientifiques menées dans les années 80 par les docteurs Klaus et Kennell. Ces études démontrent l’importance de leur travail, de leur présence qui concrètement se traduit par une diminution de 50% du taux de césariennes, 25% de réduction du temps de travail lors de l’accouchement, 60% de réduction de demandes de péridurale, un plus haut taux d’allaitement…
En 1992, sous l’initiative de ces deux docteurs, la première association américaine de doulas, DONA, voit le jour. Le courant se développe dans les pays anglo-saxons d’abord, puis au Canada et au début des années 2000 des associations de doulas naissent un peu partout en Europe pour s’étendre ensuite dans d’autres pays.

Doula et le monde médical en Belgique

Ces deux mondes sont complémentaires et leur cohabitation est un plus. Une doula ne sera jamais une sage-femme car elle n’a pas la formation ni les compétences médicales requises. Par contre, certaines sages-femmes, essentiellement les sages-femmes libérales, peuvent aussi jouer le rôle de doula. Lors d’un accouchement par exemple, la doula peut constituer, auprès de la mère, un relais pour la sage-femme lorsque celle-ci se concentre sur des actes médicaux.
Le travail des doulas vient aussi compléter le travail du gynécologue qui, lui, a essentiellement une fonction « médicale ». L’effet « blouse blanche » impressionne beaucoup de femmes qui mettent le docteur dans une position dominante et n’osent pas aborder certains aspects de leur grossesse, surtout les éléments psychologiques.
Anne-Frédérique de Wilde, doula et secrétaire de l’AFDB, insiste sur le fait « qu’en aucun cas les doulas sont les porte-paroles des parents. Si ces derniers veulent les inclure à l’équipe médicale lors de l’accouchement, c’est à eux d’en faire la demande. L’accompagnement est strictement non médical et ne remplace en aucun cas le suivi des professionnels de la santé choisis par les (futurs) parents ».

Les doulas en Belgique

L’AFDB: « Association Francophone des Doulas de Belgique » voit le jour en 2008 grâce à la passion et la volonté d’une dizaine de femmes convaincues de l’importance d’un accompagnement dans le domaine périnatal. L’AFDB a pour but d’offrir aux (futurs) parents et aux doulas un cadre structuré dont la charte éthique est l’élément central. Soutenir pratiquement les doulas membres, transmettre les informations utiles aux membres et créer, développer et maintenir un réseau en collaboration avec les professionnels de la périnatalité, voilà sa mission principale. A ce jour, l’AFDB a dépassé les 100 membres.

Comment devenir doula ?

Il existe plusieurs formations mais une seule est reconnue par l’AFDB, celle proposée par l’AFA, l’Association pour les Formations à l’Accompagnement. La formation comprend 9 modules de 2 jours répartis sur un an. Divers aspects sont abordés dont l’écoute active, les aspects physiologiques de la grossesse et de l’accouchement, l’allaitement. Ouverte à tous, elle attire aussi bien des mères souhaitant changer de domaine professionnel que des professionnels déjà actifs dans le domaine de la santé ou de la périnatalité. La formation se termine par un stage d’accompagnement de 3 familles, bénévolement, supervisé par une doula active. La plupart des doulas élargissent leur compétences par d’autres formations comme le massage, le sommeil du tout-petit, le deuil périnatal,…
A l’avenir, l’enjeu des doulas est d’obtenir une véritable reconnaissance de leur profession auprès des systèmes de santé et de mettre en place un accord de collaboration bien défini avec les hôpitaux, dans le respect et la bienveillance évidemment !

Vanessa Jansen

EN SAVOIR PLUS :
Pour fêter ses dix ans d’existence, L’AFDB organise le premier salon « Bien-naître » les 21 & 22 avril, à Ciney Expo. wwww.salonbiennaitre.be
• www.doulas.be
• www.formations-afa.be
• « Enceinte et Curieuse », Céline Laloux, Graines de Conscience



Paru dans l'Agenda Plus N° 294 de Février 2018
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