Défunts & Permaculture Pour une après-mort favorable à l’environnement
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Défunts & Permaculture Pour une après-mort favorable à l’environnement



Afin de moins «peser sur les vivants», il faudrait idéalement pouvoir mourir en nourrissant la Terre et ainsi boucler la boucle du cycle de la Nature. Nous avons rencontré Francis Busigny, heureux initiateur d’un concept salutaire qui pourrait contribuer à effacer notre «ardoise» envers les Générations Futures.





AGENDA Plus : Francis Busigny, vous êtes ingénieur conseil en valorisation soutenable des eaux pluviales et résiduaires ainsi que des déchets biodégradables. Comment vous est venue l’idée de la permaculture comme alternative aux cimetières actuels ?
F.B. : c’est la solution qui s’est imposée à nous suite à nos découvertes concernant l’impact environnemental réel des deux seules pratiques funéraires actuellement autorisées en Belgique : l’inhumation et la crémation. Mais si je suis l’initiateur de ce projet, j’ai la chance d’avoir été rejoint depuis 3 mois par Guy Basyn et, ensemble, on anime une belle équipe d’une dizaine de personnes avec qui on chemine, avec enthousiasme, pour faire adopter dans les législations belges [3 en tout !] cette nouvelle pratique funéraire qui sera la seule, réellement, environnementalement soutenable.
Nos corps sont, en effet, de plus en plus gorgés de plombages, de prothèses métalliques ou autres, de résidus de médicaments, métaux lourds, pesticides, ... Et comme si cela ne suffisait pas, l’industrie de l’«Après-Mort» en rajoute encore plusieurs couches avec la thanatopraxie, les cercueils et ornements divers, sarcophages,.... Quand on enterre ou incinère tout cela : bonjour les dégâts ! Il est urgent d’informer les vivants des problèmes liés à nos coutumes en la matière pour qu’ils puissent sereinement prendre leurs dispositions en connaissance de cause, pour que leurs proches sachent à quoi s’en tenir quand le moment sera venu. Car on dénombre quand même +/- 250 millions de morts chaque année dans le monde, soit plus de 200.000 rien qu’en Belgique... Âmes sensibles, veuillez m’excuser, mais c’est une «biomasse» qu’on ne peut plus se permettre de transformer en pollution sous prétexte ou malgré les «traditions».

A+ : la crémation n’est-elle pas plus écologique ?
F.B.
: non, car il faut savoir que la destruction par le feu d’un corps humain constitué à +/- 80% d’eau n’est pas une chose facile à réaliser, car il est extrêmement peu combustible... La crémation doit se faire à près de 1000°C pendant +- 1h30 ! Cette «destruction» est très coûteuse en énergie fossile, +/- 200L d’équivalent mazout, en plus de celle du bois du cercueil... Les vêtements, le corps, le cercueil, tout est transformé en gaz carbonique, oxyde d’azote, COV, SOx, Nox, particules cancérigènes, mercure, plomb, cadmium, ... et en poussières qui s’envolent dans les fumées. C’est une catastrophe écologique et les problèmes de santé sont nombreux aux abords des crématoriums, car les filtres sont rarement efficaces et les polluants qui y sont retenus vont à l’égout lors de leur nettoyage ! C’est d’autant plus grave que les stations d’épuration sont incapables de les éliminer... in fine, ils se retrouvent dans tout ce qui vit dans les fleuves et les mers ! Tant l’inhumation que la crémation, les seules pratiques actuellement autorisées par les législations belges, reviennent donc à empoisonner ceux qui restent : bel héritage, en vérité !

A+ : comment réduire ces impacts négatifs ?
F.B.
: il faut oublier la thanatopraxie [Ndlr : soins de conservation destinés à redonner aux morts l’apparence de la vie et à repousser la putréfaction] qui utilise des pesticides ou des biocides, tels que formaldéhyde et paraformaldéhyde, des produits très toxiques déshydratant et raffermissant des chairs, fongicides, bactéricides, virucides… Il faudrait aussi retirer les bijoux, vêtements, chaussures, difficilement biodégradables et habiller le défunt avec des vêtements en matières naturelles [coton, lin], en proscrivant les dérivés de pétrole. Opter pour un linceul plutôt qu’un cercueil en bois non traité du pays ou, pire, un cercueil en bois exotique vernis. Et, idéalement, choisir une inhumation sans caveau, ni sarcophage, ni pierres tombales [souvent importées de Chine ou d’Inde].

A+ : tout cela pointe vers un nouveau concept où la mort retrouverait sa juste place dans les cycles naturels de la Terre ?
F.B.
: tout à fait. En tant qu’adeptes inconditionnels de la permaculture, nous prônons depuis longtemps la fin du tout à l’égout, notamment par la promotion des toilettes sèches à litière bio maîtrisée, car il est urgent de ne plus priver la Terre des restes de tout ce qu’elle nous a si généreusement donnés. Depuis 35 ans que je fais du compost, je constate avec quelle facilité toute cette matière est valorisée et je me dis que cela serait merveilleux si mon corps pouvait lui aussi revenir à la Terre dans les meilleures conditions possibles ! En fait, on n’a pas d’autre choix... On doit boucler les cycles pour qu’il y ait, tout simplement, un avenir pour nos enfants ! Ce projet permaculturel est l’émergence d’une vision nouvelle sur la vie et la mort. «Nous sommes faits de poussières et nous retournerons en poussières» ce qui signifie vraiment que nous «venons» de la Terre et que nous devons y «retourner». La Terre nous a nourri pendant notre vie ; à la fin de celle-ci, il serait logique que cela soit notre corps qui nourrisse la Terre à son tour. Surtout quand on connaît l’extraordinaire capacité épuratoire du compostage et que l’on a vu les résultats au niveau de la dynamisation de l’humus des sols ... ! Bref, plutôt que polluer, contribuer une dernière fois à favoriser la Vie...
Nous proposons donc une «3ème voie», réunissant le meilleur des deux pratiques funéraires : l’avantage de la sépulture propre à l’inhumation et un aspect crémation par une «auto-combustion » lente et naturelle, qui transforme le processus en quelque chose de tout à fait propre, naturel et non énergivore.

A+ : concrètement, comment cette nouvelle pratique funéraire pourrait-elle se dérouler ?
F.B.
: chacun pourra évidemment garder les rites religieux et autres, si ce n’est qu’il vous sera conseillé d’éviter autant que possible la thanatopraxie et de choisir un linceul ou un cercueil en carton recyclé où le défunt sera seulement enveloppé dans un tissu souple. Après la cérémonie, le défunt sera acheminé vers un «Jardin pour la métamorphose en humus». Là, on le placera dans une litière biomaîtrisée que l’on aménagera pour en faire un monument vivant, par exemple recouvert de fleurs, qui se réduira pendant l’année que durera la métamorphose. Après une phase de maturation de 12 mois, ce véritable humus sain et vivant pourrait alors être débarrassé de ses éventuels résidus métalliques ou autres. Comme un seul seau de cet humus sain sera nécessaire pour fertiliser durablement l’espace commémoratif individuel [facultatif], ce serait, sans doute, judicieux d’affecter le solde de ce «super compost» à la régénération des sols les plus malmenés par l’exploitation de l’Homme afin d’aider la Terre à continuer à nous «supporter » encore longtemps. La fin d’un cycle contribue ainsi à favoriser la vie d’un autre cycle...

A+ : un tel lieu existe-t-il déjà en Belgique ?
F.B.
: Malheureusement, pas encore, mais nous y travaillons* !

Propos recuillis par Olivier Desurmont

Si cet éco-concept innovant vous interpelle, vous pouvez faire évoluer les législations en Belgique en signant la pétition via :
http://www.petitions24.net/pour_la_metamorphose_des_defunts_en_humus


Avec 10.000 de ces déclarations d’intention, une réelle «masse critique» sera atteinte !

* notons que cette méthode est déjà validée depuis quelques années au Canada, où les éleveurs sont encouragés à l’utiliser pour «transmuter en or brun» les dépouilles de leurs animaux, même malades...


Pour plus de détails et visualiser les illustrations du projet : bonne-eau-bonne-terre.eu



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